PARIS - Alors que tous les efforts sont mis en oeuvre pour accĂ©lĂ©rer le dĂ©veloppement de rĂ©seaux de tĂ©lĂ©radiologie et augmenter la rapiditĂ© de la connexion entre les images mĂ©dicales et les experts chargĂ©s de leur interprĂ©tation, certains praticiens hospitaliers qui se trouvent en premiĂšre ligne souhaitent faire une pause. Ils comparent mĂȘme les tĂ©lĂ©consultations Ă un train devenu fou et veulent reprendre le contrĂŽle des opĂ©rations.
"A l'institut Curie, nous sommes complĂštement submergĂ©s par ces requĂȘtes sollicitant notre opinion. C'est exaspĂ©rant," a estimĂ© le docteur Sylvia Neuenschwander, directrice de l'imagerie de la prestigieuse institution et prĂ©sidente de la SociĂ©tĂ© Française de Radiologie (SFR). "S'il vous plaĂźt, plus de tĂ©lĂ©-expertise avant d'y avoir bien rĂ©flĂ©chi. On doit connaĂźtre les objectifs, les buts doivent ĂȘtre justifiĂ©s, et on a besoin de structures techniques ainsi que d'une organisation fonctionnelle. Et enfin, on doit y consacrer des ressources, surtout en termes de temps et de personnel."
La séance 'Télé-expertise en radiologie' organisée lors des Journées Françaises de Radiologie (JFR), le congrÚs annuel de la SFR, a clairement révélé que des systÚmes plus efficaces étaient nécessaires pour faire face à une demande en hausse.
Le temps consacré aux téléconsultations dépasse depuis longtemps deux heures et est aujourd'hui plus proche des quatre, selon le docteur Hubert Ducou le Pointe, chef du département de radiologie à l'HÎpital Universitaire Armand Trousseau à Paris et membre actif de G4, une association à but non lucratif regroupant tous les acteurs de la radiologie en France, y compris la SFR, le CollÚge des Enseignants en radiologie de France, la Fédération Nationale des Médecins Radiologues et le Syndicat des Radiologues Hospitaliers.
"Le nombre d'outils disponibles a explosĂ©, tout comme celui des consultations demandĂ©es," a-t-il expliquĂ©. "Les gens sont perdus entre tous ces outils installĂ©s et la confusion provoquĂ©e par l'utilisation de diffĂ©rents systĂšmes pour des demandes d'avis locales, rĂ©gionales, nationales et internationales. Et il y a toujours cette pression constante pour ĂȘtre le plus rapide," a-t-il ajoutĂ©.
Pendant cette pĂ©riode de calme avant l'arrivĂ©e de la prochaine gĂ©nĂ©ration de rĂ©seaux ultra rapides, Mme Neuenschwander reçoit dĂ©jĂ bien trop de requĂȘtes par e-mail pour pouvoir bien toutes les gĂ©rer. Selon elle, il existe encore des radiologues assez douĂ©s pour sĂ©lectionner les images qui les prĂ©occupent. "S'ils veulent que je regarde 20 images, ils m'enverront 20 e-mails contenant chacun une image."
Le tĂ©lĂ©chargement d'images non sĂ©lectionnĂ©es est pour le radiologue consultant une source de frustration rĂ©cemment, a Ă©galement concĂ©dĂ© M. Ducou le Pointe. Les requĂȘtes arrivent sous la forme d'un lien, faussement simple, vers le dossier du patient, qui une fois ouvert renferme trois groupes de scanners contenant chacun 3.000 coupes.
Les rĂ©seaux de tĂ©lĂ©radiologie introduisent aussi une plus grande transparence dans les tĂ©lĂ©consultations, brisant la culture de coopĂ©ration collĂ©giale. Les directives de la SFR n'abordent pas la question des droits des patients lors des tĂ©lĂ©consultations, a soulignĂ© le docteur Liliane Ollivier, radiologue Ă l'Institut Curie. Pourtant, le droit français stipule clairement qu'un patient a le droit d'ĂȘtre informĂ© des rĂ©sultats, de savoir qui est le consultant expert et de recevoir une garantie sur la qualitĂ© de la consultation. Les archives de la consultation ainsi que toutes les opinions doivent figurer dans le dossier du patient, qui en est le dĂ©tenteur en France.
Ouvrir de nouveaux réseaux augmentera le nombre d'intervenants lors des téléconsultations, a-t-elle prévenu. Ceci aura des conséquences encore impossibles à mesurer pour le patient, le radiologue et les services de santé, comme Mme Ollivier l'a démontré avec trois exemples qui ont mal tourné.